La validation des acquis de l'expérience est une sorte de système révolutionnaire dans le milieu de la formation continue. Il permet à certaines personnes de valoriser plusieurs années d'expérience à travers le « sacro-saint diplôme » dont les entreprises françaises peinent trop souvent à se passer, ce qui en l'occurrence, est de bon augure pour les générations à venir (en dessous de Bac+5 s'abstenir de rechercher un emploi et éviter d'oser croire à un avenir possible !). Parce que l'entreprise à la française vit une crise d'addiction au diplôme, un gouvernement (lequel d'ailleurs ?), en bon paternaliste, a su offrir au salarié une reconnaissance, un recours salvateur. Une aubaine pour le secteur social en mal d'oies à enrôler ! L'hexagone manque de travailleurs sociaux, qu'a cela ne tienne, la validation des acquis de l'expérience vient d'être inventée ! Une initiative qu'il aurait fallut instituer depuis bien longtemps pour beaucoup de secteurs mais qui aurait dû être bien mieux pensée dans le secteur médico-social.
Les machines à fabriquer les travailleurs sociaux ne fournissent plus, fournées après fournées, ils ne sont toujours pas en nombre suffisant pour parer les misères du continent (peut-être parce que personne n'a encore pensé qu'ils pouvaient être mieux payés !). Dans cette ambiance, la validation des acquis de l'expérience semble faire figure de régularisation massive. Tant mieux pour les petits veinards qui après quelques années d'exercice auprès de gamins rebelles et un dossier à remplir se verront remettre le diplôme que les autres, les éducateurs spécialisés, ont obtenu après trois années d'études et trois stages, trois humbles apprentissages auprès de trois sortes de public différent.
Toutefois, et au-delà de l'injustice que cette situation ridicule suscite, il est un danger sérieux, celui de la maltraitance de l'usager. L'éducateur spécialisé dans l'histoire de la profession, travaille auprès de personnes handicapées, or, Il semble qu'il soit possible aujourd'hui d'obtenir le diplôme d'éducateur spécialisé sans n'avoir jamais travaillé auprès de personnes handicapées. L'apprentissage théorique des différentes sortes de handicap et l'irremplaçable expérience auprès d'un public qui, de part sa différence, peut surprendre, décontenancer, agacer voire insupporter, autant d'étapes d'apprentissage du métier, envolées ! Le risque à terme est bien celui que les institutions accueillant des enfants et adultes handicapés abritent sous leur toit des éducateur au rabais qui, formés au lance-pierre, pourraient être les premiers candidats à l'usure du métier et à l'envie de passer ses nerfs sur un petit handicapé ! Ce dont les professionnels ne sont, eux-mêmes, pas totalement à l'abri.
Enfin, dans un contexte où le secteur social semble s'acoquiner avec l'économie du fast-food et après avoir supporté parfois des années d'attente pour obtenir une place pour leur gamin, les parents d'enfants handicapés vont devoir à présent être vigilants quant à la formation du personnel du lieu d'accueil de leur enfant. Bienvenue dans un monde ou tout va de plus en plus vite...
Isabelle Buot-Bouttier.
Le secteur médico-social semble en effet devenir un lieu où l'on veut refourguer toutes sortes de gens en difficulté ou en échec professionnel sous couvert de reclassement vers les "services à la personne". Après tout, semblent penser nos dirigeants, il suffit d'avoir "envie" de s'occuper des autres... Préoccupant !
Malheureusement, nombre de familles ne sont pas informées des risques. D'autres, se déchargeant de leurs enfants sur la société, n'en ont de toute façon rien à faire. D'autres encore, culturellement trop modestes, n'en perçoivent pas les enjeux...
Il fut une époque où l'entrée aux écoles d'éducateur était conditionnée bien davantage par les motivations et le militantisme social, le bénévolat, les valeurs humaines et altruistes, que par le fait de possèder le bac... On voit entrer aujourd'hui des gens qui ont passé le concours parmi quelques autres, sans rapport, n'ayant jamais eu auparavant la moindre démarche sociale ou bénévole, c'est dire si ça les intéresse... C'est déjà priver le secteur de personnes motivées et valables, mais qui auront une note plus médiocre que celui qui se réoriente après un DEUG par exemple.
Pour ma part, je penses que ce système de validation des acquis de l'expérience fournira plutôt des AMPs que des éducs, mais je ne suis pas dans la tête des administratifs qui ont pondu ce truc dans les ministères...
Rédigé par : Gil | 20/08/2006 à 17:24
Si le secteur social vous semble tant en danger, si la validation d'acquis d'expérience vous semble mal pensée, trop éloignée de la réalité, ne serait-il pas important d'éviter de nous laisser passivement transporter par ce courant contemporain ? Ne serait-il pas temps de prendre part à ce système ? D'y dispenser des accompagnements garantissant une éthyque partagée de tous. D'inviter des responsable de cette VAE à se questionner et à confronter leurs travaux aux "hommes de terrain"? Cessons de parler, d'accuser, de remettre en cause, agissons, participons, et garantissons la défense de nos idées, de nos valeurs... en résumé continuons à protéger l'usager de notre inconscience !!!
Rédigé par : Cocqueret christophe | 28/08/2006 à 14:22
Bonjour,
Je vous lis avec attention depuis qu'une amie commune m'a donné l'adresse de votre blog. Je n'ai jamais eu l'occasion (ou l'audace) de répondre à vos articles, mais aujourd'hui j'ai envie de vous faire part de mon expérience.
Obtenir un diplôme par le truchement de la VAE n'est pas chose aussi aisée que vous le laissez penser. Et il semble inconcevable d'arriver à son but sans avoir jamais exercé.
J'ai suivi une VAE en 2004 (pas dans le secteur médico-social, rassurez-vous) et je peux vous dire que ce n'est pas seulement la centaine d'heures que j'ai passée à "remplir le dossier", ou l'heure de soutenance devant le jury qui m'ont donné le BTS que je visais.
Il ne faut pas oubier d'y ajouter les 12 années d'expérience professionnelle, les années entières passées à apprendre mon métier, les nuits sur l'ordinateur, les journées au travail, etc.
Par expérience, je peux vous dire que l'on ne "donne" pas un diplôme en VAE simplement en claquant des doigts et en noircissant quelques feuillets. Les exigences sont bien au-delà. Et je trouve dommage que vous laissiez-entendre le contraire.
Vous avez raison, il faut faire de l'information, mais surtout pas de désinformation. Et dévaloriser un diplôme ainsi obtenu me semble fort dangereux.
Ce BTS que je visais, je ne l'ai pas volé. Il n'est que la juste reconnaissance d'années passées à travailler et me former sans le support d'un système éducatif quelconque. Ne pas oublier d'ajouter à cela toutes les années passées à travailler 8 heures par jour pour mes différents employeurs.
Beaucoup d'années me direz-vous et vous aurez raison.
Il est impossible de se présenter à une VAE sans expérience aucune. Une des bases de cette démarche consiste à avoir minimum 3 ans d'expérience dans le métier et il faut la justifier.
Je reste à votre disposition pour toute autre information.
Bien cordialement.
Rédigé par : Bluecox | 30/08/2006 à 21:01
Chère Bluecox,
Je comprends votre emportement mais sachez que je ne parle en aucun cas de la V.A.E. en règle générale mais de celle du secteur de l'éducation spécialisée. Vous remarquerez par ailleurs que je commence mon propos en regrettant que la V.A.E. n'ait pas été instaurée depuis plus longtemps. Toutefois, je constate sur le terrain du secteur social, une tendance à délivrer un diplôme un peu hativement, parfois même sans expérience du handicap et je crains que cette situation ne soit préjudiciable pour le public du secteur social. Tel est tout simplement mon propos.
Au plaisir.
L'EDUC.
Rédigé par : L'EDUC | 06/09/2006 à 23:07
Cher Christophe,
Pourquoi n'agissez-vous pas ? Dites-vous en sustance... Mais ne coyez-vous qu'il existe différentes formes, différents niveaux d'action ? Dire et écrire, n'est-ce pas une forme d'action ? Le rôle des journalistes, des reporters, des écrivains est-il vain ? Par ailleurs, l'objectif de ce blog étant d'écrire et de débattre sur le large thème de l'éducation, pensez-vous une seconde qu'il me soit possible d'avoir une action de terrain sur tous les sujets que j'aborde sur ce blog ? Toutefois, je ne doute pas une seconde que vous soyez vous-même en action sur le terrain de la V.A.E. et je suis rassurée de constater le militantisme de certains acteurs. N'hésitez pas à nous faire partager votre expérience.
Au plaisir.
L'EDUC
Rédigé par : L'EDUC | 06/09/2006 à 23:19